REPETITIONS
Le silence. La solitude. Le temps qui passe, surtout celui qui ne passe pas. Heures épuisées au matin humide quand la pluie vient de tomber, que l'air est froid et pénétrant ; les yeux s'ouvrent pour ne plus se refermer jusqu'au creux de la nuit suivante. Et l'on se lève le corps et le coeur lourd. On se lève et on ne sait pas pourquoi. On se lève parce qu'il faut se lever, comme une habitude malsaine dont ne peut plus se libérer tant elle a été inscrite en nous. On fume une cigarette. Une autre. Un café tente de se frayer un passage dans notre estomac en nous brûlant la bouche. Quelques bruits parviennent de la vie du dehors : un chien qui aboie, des éclats de voix ou de rire ; des cris d'enfants et des voitures qui passent. Une espèce de vie qui semble étrangère. Encore une cigarette, le cendrier qui se remplit. On brule un bâtonnet d'encens qui emplit la pièce d'une odeur âcre que l'on ne supporte pas ; on ouvre la fenêtre et on respire l'air au maximum. Les pensées se bousculent, s'entrechoquent comme au premieres secondes du monde dans un bouleversement formidable de sentiments qui émergent d'un peu partout. On se parle à défaut de pouvoir parler à quelqu'un, parce que l'on se répète ; presque à l'infini. Les mots, les phrases, les lettres et les chiffres sont toujours les mêmes inexorablement. Alors on ne se parle plus qu'à soi, on s'écoute, on s'entend ; trop. De tout le corps arrivent les douleurs qui se remplacent mutuellement. On sort. On regarde les gens qui passent, qui parlent, qui semblent heureux. On prend un café. Un livre dont on lit quelques lignes. On prend des photos. On pense. Trop. On essaie d'oublier. Pas assez. La nuit tombe, lourde, libératrice et angoissante à la fois parce qu'on sait qu'elle sera longue.
"Il faut vivre ou survivre" disait la chanson.
Ecrit d'Olivier